Episode 4 – La Somme de toutes les peurs

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ui l’eut cru ? Le 1er juillet 1916, quelques mois après le déclenchement de la bataille de Verdun, l’offensive de la Somme fut déclenchée par les armées alliées.
Ces dernières nourrissaient le secret espoir de défoncer le fion des armées allemandes… mais s’était sans compter la légendaire pudeur germanique.
Alors que les Allemands avaient lancés quelques mois plus tôt une offensive sur Verdun, les états-majors français et anglais décident de faire exactement la même chose sur la Somme. Avec l’idée de créer une percée décisive obligeant à la fois les Allemands à dégarnir leurs lignes de Verdun mais aussi d’agir sur le moral des troupes ennemies… Bref, le même chose que les Allemands à Verdun.
Avouez quand même que c’est complètement con parce que ni l’une ni l’autre de ces offensives n’aboutira.

Les objectifs de cette offensive était de briser les lignes ennemies par une percée permettant de faire reculer le front et de forcer les Allemands à une retraite généralisée. Les états-majors souhaitaient rompre la guerre de position, reprendre la guerre de mouvement et donc, à terme, forcer l’Allemagne à signer la paix… mais comme toujours rien ne se passa selon les plans.
Au premier jour de l’offensive, tandis que les Français se précipitaient vers les positions adverses, baïonnettes en avant et en gueulant comme des bourrins, le commandement anglais ordonnera à ses troupes, chargés comme des mulets de contrebandiers de ne surtout pas courir.
Ils craignaient que leurs gars n’avancent trop vite perdant ainsi rapidement le contact… et c’est ce qui se produisit.
Alors que les braves soldats de l’empire britannique se conformaient aux ordres, ceux-ci avançaient bien tranquillement comme à une promenade du dimanche, l’arme à la bretelle.
– Oh ah ! John, comment allez-vous en cette si belle journée ?
– Oh ah ! Andrew, quelle surprise de vous rencontrer ici.
– Oh ! Le France est vraiment un très très beau pays, n’est-il pas ?
– Yes, je vais en profiter pour cueillir un joli petit bouquet de fleur que j’offrirais à mon général.
– Oh ah ! C’est vraiment une bonne idée. Moi je vais lui ramener de délicieuses petites fraises.
Et du coup, l’état-major perdra quand même le contact avec ses troupes étant donné que les Allemands auront le temps d’organiser leurs défenses et de tailler en pièces les soldats Anglais. Fauchés à la mitrailleuse, les Anglais rompirent définitivement le contact.
Pour la seule journée du 1er juillet 1916, les Anglais perdront près de 60 000 hommes dont le tiers de tués pour seulement des gains de terrain quasi nuls.
Les soldats Français qui avaient progressé de dix kilomètres en quelques heures durent stopper leurs avances en raison de l’échec britannique.
Malgré tout, l’offensive est maintenue et une flopée de Français, d’Anglais, d’Australiens et j’en passe se feront joyeusement trucider parce que… parce que ce plan est celui de Joffre et que Joffre veut que son plan soit exécuté, un point c’est tout, pis si t’es pas content et bah tant pis !

L’offensive s’enlisa rapidement. Les troupes Britanniques se faisaient laminer de manière industrielle, les Français s’emmerdaient et faisaient des ronds dans la boue, les Allemands se disaient que le Nord de la France était une chouette région et souhaitaient s’y installer de manière durable et chacun songeait que cette bataille de merde avait un arrière-goût de vomi ravalé mais surtout de déjà-vu.
Les commandants alliés, Douglas Haig et Ferdinand Foch, s’arrachaient les poils des moustaches en tentant des sursauts offensifs mais rien n’y faisait.
C’est alors que des nouvelles inquiétantes parvinrent à Foch et à Haig. Le ravitaillement des troupes rencontrait des problèmes pour le moins surprenants.
Les munitions explosaient dans leurs caisses. Les doses de morphine et autres médicaments semblaient se périmer et devenaient inutilisables. Les alcools et le vin se mettaient à bouillonner dans les bouteilles. La nourriture pourrissait dans les boîtes et les fromages, y compris le gruyère, fondaient sans raison apparente.
La situation militaire se transformait en pompe à merde, les trombes de flotte que déversait les nuages faisaient office de chasse d’eau et il ne manquait plus que des remontées de fosses sceptiques pour être autorisé à se dire que décidément cette bataille tournait au récurage de chiottes.
L’étrange contagion qui touchait les diverses denrées du ravitaillement, prit soudainement une tournure surprenante. Dans les tranchées la gnôle et la piquette se changeaient en soda ou en jus de fruit. La viande de cochon et de bœuf se changeait en steak de tofu et le camembert devenait de la vache qui rit.
Pire que cela, l’épidémie parvenait jusque dans les cuisines raffinées de l’état-major.
Notre Ferdinand national découvrit avec stupeur que sa poularde à la sauce suprême aux champignons s’était changé en risotto aux épinards de régime déprotéiné.
– Nom d’une pute ! S’exclama Ferdinand. Mais qu’est-ce que c’est encore que ce merdier ?
– À problème exceptionnel, je proposerais une réponse exceptionnelle. Déclara un jeune officier.
– Que voulez-vous dire, mon capitaine ?
– Tous ces incidents ont lieu en même temps et sur la ligne de front. Je ne crois pas au hasard. Je pense que les Allemands sont derrière tout cela et nous devons envoyer quelqu’un pour enquêter et neutraliser les responsables.
– À qui pensez-vous ?
– À l’héroïque et noble capitaine du « Coco l’asticot », le Caporal Justice… vous le connaissez, je crois ?
– Euh… oui… j’ai eu l’occasion de m’entretenir avec ce con… patriote… avec ce compatriote, lors de la bataille de l’Artois du printemps 1915. Vous croyez vraiment que le Caporal peut remédier à ces singuliers problèmes de ravitaillement ?
– J’en suis persuadé, il a fait des merveilles à Verdun et le général Pétain ne tarit pas d’éloges sur son compte et sur celui de son équipe de héros.
– Un con qui fait l’éloge d’un con, on se croirait à la chambre des députés ! Marmonna Ferdinand.
– Plaît-il, mon général ?
– Euh… rien ! Je me parlais à moi-même.
– Certainement de hautes considérations militaires et patriotiques.
– Oui, c’est ça ! Compte là-dessus et bois de l’eau !
Foch accepta, presque à contrecœur, de faire appel au désormais célèbre Caporal Justice et à l’équipage du « Coco l’asticot ».
Le général Haig exigea la présence d’un soldat de l’empire britannique au sein de l’équipe du Caporal et Foch lui emboîta le pas en proposant la présence d’un sous-officier dans cette même équipe.
Les deux officiers généraux étaient parfaitement au courant de ce qui s’était passé à Verdun. Ils avaient lus en détail les rapports sur la neutralisation des presses clandestines puis l’abordage hors du commun du zeppelin géant.
Leurs exigences d’avoir des hommes à eux au sein de l’équipe du Caporal tenait au fait qu’ils seraient plus tranquilles de savoir que des gens intelligents pourraient avoir une influence bénéfique sur un super crétin dont le super pouvoir de voler, consistait à sortir sa bistouquette et à faire l’hélicoptère avec.
Pour la France, ce fut un adjudant-chef de la Légion étrangère qui fut choisi, un certain Max Mader. Pour l’empire britannique, un jeune soldat Australien du nom de Albert Jacka fut retenu.
Lorsque le « Coco l’asticot » apparut dans le ciel de Picardie, les soldats l’ovationnèrent.
Un orchestre entonna une Marseillaise solennelle pour accueillir les héros qui avaient sauvés Verdun… mais lorsque le Caporal, Horace et Mafé débarquèrent, ils se fendirent de guillerets pas de danse et autres entrechats et l’orchestre cru bon de les accompagner avec un air adéquat, en l’occurrence une de ces musique nouvelle venant des Etats-Unis : le jazz de la Nouvelle-Orléans.
La cérémonie menaçait de se transformer en annexe du Dixieland lorsque les généraux mirent le holà aux conneries.
Ferdinand présenta le général Haig au Caporal puis lui fit un exposé des faits troublants qui menaçaient le ravitaillement sur le front de la Somme.
– Et selon vous, les Allemands seraient responsables de ces événements ? Demanda le Caporal.
– Ces ignobles gredins sont coutumiers des coups fourrés. Ça ne peut être qu’eux.
– Mais de quelles manières s’y seraient-ils pris pour gâter et détériorer les divers ravitaillements ? Des gaz, du poison ?
– La fourberie n’a pas d’odeur, Caporal. Si les Allemands avaient utilisés des procédés tel que le gaz ou le poison, nous l’aurions vite remarqués. Hors le mystère reste entier sur tout cela. C’est la raison pour laquelle vous êtes ici. Avec vos hommes, vous enquêterez et réglerez ce problème.
– À vos ordres mon général, on y va tout de suite !
– Minute papillon ! Il y a autre chose… Comment dire… il serait judicieux de ne pas réitérer le succès de votre expérience aéroportée à Verdun. Dans ce but, avec le général Haig, nous avons décidés de vous adjoindre deux de nos hommes qui surveilleront, et à l’occasion corrigeront, votre respect de l’honneur et de l’intégrité de l’armée française.
– Comprends pas !
– Euh… ! Ils vous aideront et vous conseilleront dans le but que vous ne déshonoriez pas l’uniforme français par quelques tours de passe-passe qui s’avéreraient être en contradiction avec le respect des bonnes mœurs et bien évidemment propre à choquer l’opinion publique. Ces deux messieurs, honorables gentilshommes, seront en quelque sorte des chaperons bienveillants qui justement veilleront à ce que vous et vos hommes combattiez l’ennemi de manière chaste et en respectant la bienséance en usage dans nos sociétés civilisés.
– Comprends toujours pas !
– Nom d’une pute ! Hurla Ferdinand excédé. Ces deux connards sont là pour t’empêcher de sortir ta bite et de l’agiter dans tous les sens. À cause de ça, tout le monde se fout de notre gueule. Même les rastaquouères de Papouasie, qui mettent leurs machins dans des étuis péniens de compétitions, se payent notre tronche, à nous, Français, peuple éclairé de la philosophie des Lumières, de la poésie romantique, de l’amour courtois et de la littérature classique… Bordel de merde !
– C’était pas plus simple de le dire comme ça ?
À cette réplique, le général Haig du retenir Ferdinand de voler dans les plumes du Caporal. Après quelques instants consacrés à reprendre ses esprits, le général Foch présenta au Caporal les deux hommes qui compléteraient son équipe.
Fidèle à lui-même et à son esprit de camaraderie, le Caporal Justice serra chaleureusement la main des deux soldats en s’exclamant :
« Chouette ! Des nouveaux copains ! »
Et c’est à cet instant que le drame arriva… les deux hommes se présentèrent.
– Je m’appelles Albert Jacka, je suis Australien.
– Ach so ! Gutentag Kaporal. Ich bin Max Mader, adjudant dans la légion étrangère.
– Quoi ! Un Autrichien et un Allemand ?
– Ach, ja ! Je suis d’origine allemande… et après ?
– Euh… moi j’ai dis Australien, pas Autrichien !
– Ils avouent… ce sont des espions !
– My God ! On m’avait dit qu’il était con mais pas à ce point !
« Grognon, grognon ! Pas content ! Violence ! Haine ! Bagarre ! Torgnolles dans vos margoulettes ! » Cria le Caporal Justice avant de se jeter sur le Légionnaire et l’Australien pour une empoignade mémorable car le juteux et le kangourou, loin de se laisser faire, répliquèrent aux coups avec une vigueur insoupçonné chez des jeunes gentilshommes biens sous tous rapports.
À la fin, malgré bosses et horions en tous genres, les trois andouilles rigolaient comme des cons.
Le général Haig semblait effaré par la scène à laquelle il venait d’assister et le général Foch, à la fois résigné et consterné, ne put s’empêcher de dire :
« Putain ! On a créé des monstres ! »
Albert et Max se présentèrent à Horace et Mafé. Le courant passa immédiatement entre les cinq soldats qui rigolaient entre eux et se promettaient des aventures et des bagarres d’anthologie.

Les cinq soldats se réunirent aussitôt dans le poste de pilotage du « Coco l’asticot » pour discuter du plan à adopter afin de résoudre le mystère du pourrissement et de la métamorphose des denrées acheminées vers le front.
Ne connaissant absolument pas l’origine de ces transformations singulières, il fut décidé de commencer l’enquête dans les endroits où furent observés les premiers cas : dans les tranchées de première ligne.
Ce serait mentir que de dire que l’équipe du Caporal passa inaperçue dans les tranchées. Le Caporal était une célébrité accompagné d’un cantinier dont la longue et soyeuse barbe faisait pâlir de jalousie les autres Poilus, d’un tirailleur qui était certainement le seul Noir sur plusieurs dizaines de kilomètres, d’un légionnaire d’origine allemande et d’un Australien qui avait une tête de premier de la classe.
Ils constatèrent d’abord avec effroi les funestes conséquences du phénomène. La nourriture et les boissons étaient parfaitement consommables mais les soldats devaient se contenter exclusivement d’un régime végétarien voire de ce type de nourriture industrielle bourrée de conservateurs et de chimie.
« Ach ! Un peu comme ces ersatz de bouffe que des scientifiques Allemands ont développés avant la guerre. Remarqua Max. Il n’y a que ces grosses larves débiles et hystériques d’hygiénistes et d’antispécistes pour ingurgiter des trucs pareils. C’est l’une des raisons pour lesquelles j’ai quitté l’Allemagne pour la France. »
– Tiens donc ! Fit le Caporal. De la bouffe synthétique allemande, ça pourrait être une piste.
– Oui mais là, il s’agit de vraie nourriture transformé en pâtée végétarienne. Souligna Horace. Comment s’y prennent-ils pour arriver à un tel résultat sans que l’on puisse soupçonner leur présence ?
– Sans compter qu’il n’y a pas que la nourriture. Continua Mafé. Il y a aussi les munitions qui explosent et les médicaments qui se périment.
– Les Allemands ont dus infiltrer dans nos lignes des espions et des saboteurs. Reprit le Caporal. Ces derniers ont forcément laissés des traces de leurs passages sur la ligne. Séparons-nous, camarades, enquêtons, furetons et farfouillons avec diligence… et sans sortir nos bites !
Un grand éclat de rire mâle et tonitruant secoua les soldats et toute la première ligne. L’humour fin et raffiné est l’apanage des guerriers !

Le Caporal arpentait une tranchée de son secteur de recherche en scrutant le moindre détail. Parfois il interrogeait les copains qu’il croisait sur son chemin. Ceux-ci montaient la garde à un poste de guetteur ou vaquaient à de pacifiques occupations comme la lecture ou l’écriture de lettres à la famille.
Cela faisait plusieurs heures qu’il tournait en rond sans rien trouver d’intéressant pour son enquête. À croire que les saboteurs Allemands étaient aussi discret que des souris.
Il croisa des servants de mitrailleuses qui venaient de recevoir de nouvelles caisses de munitions et qui les entreposèrent dans une niche à l’abri de l’humidité.
Le Caporal salua les mitrailleurs et passa son chemin lorsque soudain des coups de feu en rafales éclatèrent. L’origine des tirs était proche et les hommes se jetèrent au sol. Le Caporal fit demi-tour et découvrit que les caisses de munitions avaient explosé juste après avoir été installés dans la niche protectrice.
C’était incompréhensible. Aucun espion, aucun saboteur à l’horizon. Comme si une main invisible avait agit sur les cartouches. Pas même un trou dans le sol… mais sur le sol, le Caporal Justice remarqua quelque chose qui n’était pas là quelques secondes auparavant.
Cette chose, le Caporal savait ce que c’était. La marque du mal, l’empreinte de la fourberie, la seule trace que laissait derrière lui l’ignoble personnage qui évoluait caché dans l’ombre. Cette marque, c’était un bout de saucisse de Francfort mâchouillé.
« Saperlipaupiette ! S’exclama le Caporal. Le second espion qui a réussi à s’enfuir de l’Etoile de la mort au-dessus de Verdun. »

Réunion de crise sur le « Coco l’asticot » !
Le Caporal montra à ses petits camarades le bout de saucisse incriminé.
– Les copains, ce bout de saucisse est la preuve que ce sont bien les Allemands qui sont à l’origine des multiples sabotages qui touchent le ravitaillement. Ce diabolique bout de saucisse est la marque du second espion qui nous a échappé à Verdun.
– My God ! Mais quel est cette chose ? Demanda Albert Jacka.
– Ce qui est certain c’est que ça ne donne pas franchement envie. Rétorqua Mafé.
Les regards convergèrent vers Max Mader, le légionnaire d’origine allemande.
– Was ? Pourquoi vous me regarder tous comme ça ?
– Qui d’autre qu’un Allemand pourrait nous informer sur cette chose ?
– C’est justement à cause de ce genre de chose que j’ai rejoint la Légion étrangère, on y mange du vrai boudin… il s’agit d’une saucisse de Francfort de la marque Globale Wurst. À base de viande reconstituée, déshydratée et enrichie à la protéine de synthèse E.412, avec exhausteur de goût ZP.978, plus des conservateurs chimiques comme le dernier né des usines Bayer : le WHXZ 3000 à base d’oxyde d’éthylène ou encore le célèbre Rundoups de Monsanto, subtil mélange de pyralène, de radium et de soude caustique. En bref, que des trucs traditionnels et bio… d’ailleurs, ils vendent ces saucisses comme des produits bio et traditionnels. Le complexe industriel qui fabrique ces saucisses et qui pollue le Rhin depuis des décennies, a même reçu un label écolo.
– Très bien, on sait que les Allemands sont responsables des sabotages mais comment s’y sont-ils pris ? Remarqua Horace. Le Caporal ne les a même pas vu agir. Ils ne sont quand même pas invisibles.
– Nous savons qu’ils n’ont pas pu agir directement sinon nous aurions trouvés d’autres traces que ce bout de saucisses. Renchérit Albert. C’est donc qu’ils ont agi à distance.
– Depuis les tranchées adverses ?
– Impossible sinon comment ce bout de saucisse se serait retrouvé dans nos lignes.
– Et pourquoi pas… depuis les airs. Proposa le Caporal.
– Impossible, nous aurions entendu les moteurs et de toute façon il n’y avait aucun appareil dans le ciel. Si les leurs avaient été présents, les nôtres auraient attaqués mais en l’occurrence tout était calme de ce côté là.
– C’est vrai, j’ai consulté les rapports des observateurs et ils n’ont signalés la présence d’aucun appareil au-dessus du secteur.
– Nous résoudrons ce mystère plus tard. Conclut le Caporal. L’impératif de notre mission est maintenant d’infiltrer les lignes ennemies pour cibler la menace et la neutraliser.
– Ach ! Je suppose que tu as un plan subtil et efficace. Fit Max.
– Yes, un plan so Frenchie d’une grande finesse, i suppose. Renchérit Albert.
Le Caporal lança un regard complice à Horace et Mafé. Les deux nouveaux avaient besoin d’être formé à la stratégie caporalienne.
« Ouais ! Comme à Verdun ! » Crièrent joyeusement les trois andouilles d’élite de l’armée française.

Chers lecteurs, vous devez admettre que pour cette mission, rentrer dans le lard des Allemands serait particulièrement contre-productif. Il faut vous faire une raison et accepter que toutes les aventures du Caporal Justice ne peuvent pas être un prétexte à la violence gratuite… ou à sortir sa bite et à l’agiter dans tous les sens pour faire rigoler les copains.
Les Aventures du Caporal Justice doivent être avant tout un support littéraire pour la promotion de la langue, de la culture et du savoir-vivre français. Les valeurs de notre beau pays doivent aussi être mis en avant. L’intelligence, l’ingéniosité, le panache, le courage, la magnanimité, l’esprit chevaleresque et aventureux, la noblesse… désormais, le Caporal et ses fidèles compagnons devront apprendre à se tenir en public, y compris face à l’ennemi et remplaceront la témérité par le sang-froid et la réflexion hautement intellectuelle avant d’agir… Parce qu’il faut bien dire que les deux nouveaux copains, Max et Albert avaient été directement mandatés par les généraux Haig et Foch et que s’ils merdaient leur mission, ils se prendraient bien plus que des volées de bois vert à travers la tronche.
Le kangourou et le légionnaire calmèrent donc les velléités offensives du Caporal, d’Horace et de Mafé et proposèrent un plan qui avait l’avantage d’être issu d’une délibération et d’un retour de la pensée sur elle-même en vue d’examiner la situation… en clair, les deux nouveaux, contrairement aux trois andouilles, avaient réfléchis.
Le plan proposé, reposait sur le fait que Max était d’origine allemande. Il s’agissait de s’infiltrer derrière les lignes ennemies, Max et un autre se feraient passer pour des soldats du Kaiser tandis que les trois autres se feraient passer pour des prisonniers.
« Sehr gut ! Maintenant que le plan a été exposé, il s’agit de savoir lequel d’entre vous connaît la langue de Goethe. Sprechen sie Deutsch ? »

À bien y réfléchir, l’élaboration et l’exécution d’un plan c’est bête comme chou, il suffit juste d’avoir les bons outils ou les bonnes personnes.
Dans le feu de l’action, on a toujours du mal à relativiser certaines petites choses, les petits détails qui font qu’un plan censé se dérouler sans accrocs, risque de foirer lamentablement comme la présidence de Macron.
Lorsque les soldats Allemands qui patrouillaient tranquillement entre leurs lignes et les ruines de la ville de Péronne, rencontrèrent deux des leurs escortant trois prisonniers de guerre, ils furent un peu surpris.
– Halt ! Patrouille allemande. Que faites-vous ici ?
– Ach ! Nous escortons ces trois prisonniers de guerre jusqu’au QG de Cambrai pour les faire parler. Déclara Max.
– Wunderbar ! Qu’avons-nous là ? Un Australien, un cantinier d’élite et… Mein Gott ! Qu’est-il arrivé à celui-ci, il porte un masque ?
– Il a été blessé près des yeux et comme il est un peu coquet, il préfère porter un masque. Répondit Max.
– Es ist Rikolo ! Comme ça, on dirait le Kaporal Justice.
Les patrouilleurs, les prisonniers et les faux soldats Allemands rirent de bon cœur.
« Ach so ! Renchérit Mafé. Heureusement que ce n’est pas lui sinon il nous botterait les fesses. »
Tous ce petit monde se mit à rigoler de bon cœur lorsque les patrouilleurs détaillèrent la mise du camarade qui venait de parler.
– Himmel ! Mais qu’est-ce qui t’es arrivé, kamerad ? Tu as la peau complètement noire.
– Ja, je sais. Répondit Mafé. C’est le mélange de la poudre des obus et de la boue. Vous ne trouvez pas que comme ça, je ressemble à l’un de ces nègres Africains ?
– Je dois bien reconnaître que c’est saisissant comme effet… mais c’est étrange, tu as un accent curieux. D’où viens-tu, kamerad ?
– Euh… ! Je viens… du sud.
– Du sud de l’Allemagne ? La Bavière ?
– Non, un peu plus au sud… en fait, je suis Autrichien.
– Ach ! Osterreich ! Wien, Graz, Salzbourg ?
– Plus au sud encore… Laibach, je suis de Laibach.
– Ach ! Tu es un Autrichien de Slovènie, c’est pour ça, l’accent !
– Voilà, voilà ! Toussa toussa !
– Bon, c’est pas tout ça mais nous autres, on a une patrouille à terminer. On ne va pas vous embêter plus longtemps.
– Au fait ! Reprit Max. Nous avons aussi des ordres à transmettre à ceux qui utilisent une arme secrète contre nos ennemis et qui fait pourrir leurs ravitaillements. Vous sauriez où nous pourrions les trouver ?
– Ach ! Une arme secrète ? Ma foi, les seuls qui pourraient utiliser un truc de ce genre dans le secteur ce sont ceux qui travaillent à la base aérienne et scientifique ultra secrète qui se trouve à quelques kilomètres d’ici sur la route de Cambrai. Vous la trouverez facilement grâce aux panneaux indicateurs.
– Viele danke !

Quelques heures plus tard, nos aventuriers de choc arrivèrent enfin près de la base ultra secrète. Un gigantesque panneau du génie allemand indiquait en lettres gothiques :

Achtung !
Base aérienne et scientifique ultra secrète de l’armée allemande.
Si vous êtes Français ou Anglo-saxons, faites demi-tour, c’est un ordre !

Le côté autoritaire et très allemand de l’avertissement était extrêmement efficace puisque le Caporal et ses compagnons faillirent faire demi-tour. Heureusement, avec eux il y avait justement un Allemand qui les empêcha de foutre le camp.
– Ces panneaux sont drôlement efficaces, on a failli se barrer.
– C’est le subtil mariage entre les caractères gothiques et la tournure tranchante et péremptoire du message inscrit qui s’avère dissuasif. Répondit Max. C’est une vieille méthode militaire germanique qui a fait ses preuves.
Ils s’infiltrèrent dans la base par un trou dans le mur d’enceinte et gagnèrent discrètement le complexe militaire et scientifique. Ce qu’ils découvrirent était absolument inimaginable. Même vous, chers lecteurs, ne pouvez imaginer une technologie aussi innovante et stupéfiante.
Entre le terrain d’aviation et les bâtiments renfermant les laboratoires scientifiques, plusieurs soldats Allemands faisaient d’ahurissantes allées et venues. Ils portaient de lourdes caisses de matériels, allaient au milieu du terrain où il n’y avait rien et… les caisses disparaissaient comme par enchantement. Les soldats Allemands agissaient comme si tout cela était naturel.
– C’est incompréhensible ! Ces caisses disparaissent comme par magie.
– Ça y est, j’ai compris. Déclara Horace. Regardez mieux, vous ne distinguez rien ?… Soyez plus attentifs. Les caisses ne disparaissent pas, les soldats les embarquent dans un camion qui a été peint de sorte à le confondre avec le paysage.
– C’est pourtant vrai. C’est bien un camion mais il faut avoir l’œil exercé.
– J’ai entendu parler de cette nouvelle technologie de pointe. Ce sont des artistes qui ont mis au point les différentes peintures de camouflage et on les utilisent aussi bien pour les navires de guerres que pour les bâtiments… seulement je ne savais pas que les Allemands étaient aussi avancés dans ce domaine.
– Le progrès technologique ! C’est terrifiant !
– S’ils réussissent à avoir ce résultat saisissant avec un camion, imaginez avec un avion.
– Toutefois il resterais le problème du bruit du moteur. Avec le bordel que cela peut faire, l’invisibilité que procurerait le camouflage ne servirait plus à rien.
– Nous devons nous approcher des bâtiments et visiter les laboratoires. Il y aura certainement des réponses à nos questions.
Le Caporal, Horace et Albert assommèrent discrètement trois sentinelles et endossèrent leurs uniformes. La fine équipe ainsi déguisée put se mêler à la garnison ennemie sans attirer l’attention et finalement la barrière de la langue ne fut en rien un problème.
– Ach ! Gutentag kameraden. Was machen Sie hier ?
– Ja, ja, ja !
– … ! ! !
– Hallo kameraden. Was denken Sie an die kritische Genealogie der Westkultur von Friedrich Nietzsche ?
– Ja, ja, natürlich ! !
– … ! ! !
Ils pénétrèrent dans les bâtiments et commencèrent à inspecter les laboratoires. Ce qu’ils y trouvèrent les glacèrent d’effroi.
Les artistes Allemands mobilisés pour réaliser les peintures de camouflage avaient élaborés un nuancier regroupant toutes les couleurs pouvant être utilisés pour rendre parfaitement invisible des navires de guerre, des camions, des bâtiments… et même des avions. Ceux-ci devenaient totalement invisibles aussi bien à ceux qui étaient au sol, qu’aux observateurs et aux pilotes adverses.
Ils trouvèrent ensuite les plans d’un appareil que l’on pouvait adapter sur n’importe quelle machine et dont la fonction était de réduire les bruits de moteur.
– Voilà donc comment ils s’y sont pris. Ils ont rendus un aéroplane totalement invisible et silencieux. Tu avais raison Caporal, le mal venait bien des airs.
– Certes ils ont réussis à approcher nos lignes sans se faire voir et sans se faire entendre mais qu’ont-ils utilisés pour saboter le ravitaillement ?
Le Caporal s’approcha d’une corbeille à papier et prit un paquet vide qui avait été jeté à l’intérieur. Il montra le paquet à ses camarades.
« Un paquet de saucisses de Francfort de la marque Globale Wurst. Nous approchons de la clé du mystère. »
Le Caporal avisa une porte sur laquelle était inscrit : « Bureau d’études des inventions terrifiantes ».
Il ouvrit la porte et se retrouva dans une grande salle de réunion. Certainement l’endroit où les scientifiques faisaient le point sur les applications de leurs inventions et sur les améliorations à y apporter.
L’un des murs était entièrement tapissé de plans et de croquis représentants sous différents angles et coupes, une sorte de canon muni d’un gros générateur.
– Max, tu peux traduire ce qui est écrit sur ces plans ?
– En toute franchise, le langage technique utilisé est aussi obscure pour vous que pour moi. Le domaine scientifique dont relève ce machin est d’une complexité telle que ce doit être une technologie encore plus élaborée que les peintures de camouflage ou les moteurs silencieux.
– Dans le doute, il n’y a qu’une seule chose à faire : se livrer outrageusement à l’acte de sabotage. Qui a des crayons ?
Les soldats détériorèrent et dégradèrent les plans techniques à coups de crayons… en écrivant des conneries dessus et en faisant des dessins cochons.
« Regardez les copains, j’ai dessiné une gonzesse avec des gros nichons ! »
« Moi, j’ai dessiné le Kaiser en train de faire popo ! »
« Et moi j’écris des gros mots partout, c’est rigolo ! »
Dans chaque soldat il y a un petit enfant malicieux qui sommeille !… mais lorsque la réalité de la guerre déboula dans le bureau comme papa et maman dans la chambre, les cinq compagnons firent courageusement face.
Une vingtaine de soldats investirent le bureau d’études l’arme à la main. L’homme qui commandait la base secrète et qui était à l’origine de toutes ces innovations technologiques ultra modernes apparut. Le capitaine Hippolytus Krok.
– Gutentag, Kaporal Justice. Ça faisait longtemps.
– Saperlipotache ! Le capitaine Krok. J’aurais dû me douter que vous étiez derrière toutes ces inventions diaboliques.
– Vous vous connaissez ?
– Oui, je l’ai rencontré à la Main de Massiges en 1915. Ce sont les potes Antillais qui se sont occupés de son cas… et toi, qui est en train de lire ces lignes, si tu veux savoir de quoi il retourne, je t’invites à lire l’épisode 2 de mes incroyables aventures que tu trouveras sur le site Internet : https://lesaventuresducaporaljustice.wordpress.com
– C’est quoi Internet ?
– Une autre invention diabolique mais c’est pas pour tout de suite.
– Taisez-vous bande de pets hurlants Français ! Ordonna Hippolytus. À cause de la Compagnie Créole et de la magie antillaise pleine de perversité, j’ai du être soigné dans un sanatorium pour une dépression et pour une carence en vitamine D… mais le soleil de la Martinique n’a pas réussi à ébranler mon rigoureux esprit scientifique. J’ai réfléchi à une arme absolue, capable de changer radicalement la composition moléculaire de n’importe quel objet… cette arme est si efficace et si discrète que vous n’avez même pas remarqué que nous l’avions utilisés sur vous… à travers les murs de ce bureau.
– Qu’est-ce que c’est que ces conneries ?
– Soldat ! Ayez l’obligeance de tirer une balle dans le cul du Kaporal.
L’un des gardes épaula son fusil et visa le derrière héroïque du Caporal. Il tira et la balle… plutôt que de rebondir, traversa la fesse du super héros.
« Ouaillle ! Mais ça fait un mal de chien, bordel de merde ! Ouiiiiin ! J’ai bobo à mon cul ! »
– Muahahahahah ! S’esclaffa l’ignoble Krok. Non seulement tu t’es pris une balle dans le fion mais surtout tu as perdu tes supers pouvoirs. Tu es redevenu un simple soldat que rien ne distingue de l’immense masse militaire. Soldats, amenez les prisonniers sur le terrain d’aviation. Avant de vous envoyer dans un camp de prisonniers sur les bords de la Baltique, je tiens à vous montrer l’arme ultime du Reich.
Nos cinq héros vaincus furent escortés sous la menace des armes. À l’extérieur on les fit aligner devant un gigantesque hangar. Les portes de celui-ci furent ouvertes et des personnels du génie firent sortir un bombardier quadriplan aux dimensions exceptionnelles.
– On dirait un bombardier Caproni Ca.42. Remarqua Albert.
– C’est presque cela. Corrigea Hippolytus. Le Caproni Ca.42 est un bombardier italien triplan. Vous avez ici la version allemande en quadriplan. Je vous présente le Krok Kr.430, autrement appelé le Sturmkampfflugzeug.
– Bombardier de destruction apocalyptique. Traduisit Max.
– Exact ! Mais entre nous, nous préférons le diminutif Stuka. Comme vous pouvez le remarquer, le fuselage et les ailes sont peints de manière à le rendre totalement invisible une fois dans les cieux. Son puissant moteur est équipé de la technologie qui rend ce dernier aussi silencieux qu’un pet de mouche… cet appareil est le premier de son genre : un bombardier furtif.
Une série de bruits étranges et pas très ragoûtants se firent entendre. Le Caporal avait des gaz et se mettait à péter de manière incontrôlé.
– C’est vrai, j’oubliais le principal. Reprit Hippolytus. Vous avez infiltrés notre base secrète pour découvrir comment nous nous y sommes pris pour saboter votre ravitaillement. Voici la plus belle de mes inventions : le Canon Atomique à Micro-Ondes Radiatives, le CAMOR.
Des manœuvres amenèrent sur un plateau à roues une curieuse machine ressemblant à un canon couplé à une sorte de gros générateur. Ceux-ci, sans s’occuper des prisonniers, commencèrent à équiper l’immense bombardier Stuka de l’étrange dispositif.
« Cette arme génère des rayonnements électromagnétiques non-ionisants de types micro-ondes et de charge élémentaire absolument nulle. Continua Hippolytus. Ces rayonnements sont ensuite associés à un rayonnement corpusculaire protonique directement ionisant qui permet ainsi d’agir sur les particules subatomiques en accélérant de façon exponentielle leurs capacités et leurs caractéristiques ondulatoires… et pour les gros nazes qui n’ont pas pigés un broc de ce que je viens de dire : le CAMOR modifie la matière à l’échelle moléculaire. En gros il peut transformer un pied de porc à la Sainte-Menehould en purée de concombre au glyphosate, de la fourme d’Ambert en babybel, faire exploser des munitions à distance et accélérer la péremption des médicaments. »
Le Caporal se remit à dégazer. Il se tenait le ventre et tentait de serrer les fesses comme s’il était frappé par une soudaine diarrhée.
– Bon sang mais qu’est-ce qui m’arrives ?
– Je gardais le meilleur pour la fin, Kaporal Justice. Le CAMOR peut aussi être utilisé sur des organismes vivants tels que… des supers héros. En toute sincérité, j’espérais que tu te transformes en un magnifique spécimen de Prussien athlétique et entièrement dévoué à l’Allemagne et au Kaiser… mais ton système digestif va se remplir de gaz jusqu’à ce que tu sois changé en gros franchouillard obèse et réduit à l’état de légume. Que veux-tu, la science n’est pas aussi parfaite qu’on le souhaiterait, il faut bien des expériences ratées avant d’obtenir les résultats escomptés. Lorsque nous aurons gagnés cette guerre, je mènerais moi-même le Stuka au-dessus de la Martinique et grâce au CAMOR, je transformerais cette île en une gigantesque brasserie bavaroise et on se régalera de quiches à la noix de coco et de strudels à la banane arrosé de schnaps à base de canne à sucre… Muahahahahah !
– Espèce de fumier !
– Gardes ! Emmenez les prisonniers.
Les soldats Allemands firent avancer nos cinq héros en leur donnant de petits et mesquins coups de crosse dans les reins. Ils s’éloignèrent de la piste de décollage et rejoignirent un camion qui les emmènerait vers un camps de prisonniers.
Le pilote du véhicule, un officier plutôt bien balancé, descendit et planta son regard dans les yeux des soldats Allemands.
– Vous êtes tous des labradors. Fit l’officier d’une voix étrange. Vous êtes tous de bons gros pépères gentils et obéissants.
– Ach ! Ja, herr hauptmann. Répondirent les soldats de l’escorte désormais sous hypnose.
– Et maintenant vous allez chercher la baballe. Reprit l’officier en sortant et en lançant une petite balle pour chiens.
Les soldats de l’escorte se ruèrent joyeusement sur la balle tandis que l’officier retirait sa casquette, laissant retomber sur ses épaules une longue chevelure blonde.
– Skarlett Meister ! Mad Moselle ! S’écria Horace. Mais on vous croyait en détention dans un camp de prisonnières.
– Je me suis échappé en hypnotisant les gardiens.
– Mais qu’est-ce que vous faites ici ?
– En fait je voulais retrouver mon gros doudou de Caporal. J’ai su que le haut commandement allié avait fait appel à votre équipe sur la Somme. Lorsque j’étais encore la tortionnaire attitré de l’empereur, j’avais accès à certaines informations classées secrètes. Je connaissais l’existence des travaux du capitaine Krok, je me suis donc infiltrée dans cette base peu avant votre arrivée… ce qui m’a permis d’étudier un peu les effets du CAMOR et j’en suis arrivé à la conclusion que mon gros doudou de Caporal peut être sauvé grâce à ceci…
Skarlett sortit une bouteille de rosé d’Anjou, la déboucha et planta le goulot dans le cornet du Caporal qui se mit à biberonner toute la boutanche en un temps record.
Aussitôt les effets de l’effroyable invention d’Hippolytus disparurent. Le Caporal testa sa force en soulevant le camion d’une seule main. Les supers pouvoirs étaient revenus quoique notre super héros était encore un peu faiblard.
– C’est normal. Rassura Skarlett. Il faudra quelques jours pour que tu sois de nouveau à ton plein potentiel de petite fripouille qui me donnera de vigoureuses fessées parce que j’ai été une vilaine fille… enfin je veux dire, pour que tu sois en pleine forme. Les supers nutriments protéiques phosphatés à variation subatomiques contenus dans le vin d’Anjou permettent de stabiliser les caractéristiques ondulatoires des molécules responsables de tes supers pouvoirs. Pour faire court, je viens de te sauver la vie, Caporal Justice.
– Merci Skarlett. À compter de ce jour, tu fais partie de l’équipe du « Coco l’asticot ».
– Ça veut dire que j’aurais droit à une fessée ?
– Euh… oui bien sûr… mais pas tout de suite…
– On ne vous dérange pas trop tous les deux ? Intervint Albert. Non parce que c’est quand même la guerre, je vous le rappelle.
Sur la piste de décollage, le Stuka prit son envol et quitta la base secrète pour une nouvelle et funeste mission de sabotage.
Il fallait agir vite et sans aucune considération pour les ordres. Le Caporal donna des ordres à chacun des membres de sa fine équipe de héros.
– Skarlett, tu vas hypnotiser les gardes de la base et les faire prisonniers. Max et Albert, vous allez détruire les laboratoires, il ne faut pas qu’une telle technologie se retrouve entre de mauvaises mains… Horace et Mafé… comme à Verdun !
– Quoi ! Tu vas refaire l’hélicoptère ?
– Je ne suis pas d’accord. Intervint Max. Foch et Haig nous ont bien dis de t’empêcher de faire ce genre de connerie.
– C’est le seul moyen d’intercepter le Stuka et d’empêcher le capitaine Krok d’utiliser le CAMOR contre nos troupes.
Afin de respecter au minimum les règles de la bienséance, le Caporal se tourna pour sortir son machin tandis que Max et Albert empêchaient tant bien que mal Skarlett de regarder.
Horace et Mafé accrochèrent leurs brelages aux bandes molletières du Caporal et l’équipage aéroporté prit son envol et se lança à la poursuite du bombardier allemand géant.

Albert, Max et Skarlett se lancèrent à l’assaut de la base. Les soldats ripostèrent en leur tirant dessus. Un sous-officier pointa son pistolet vers Albert et lui tira une balle dans la tête. Le kangourou fut foudroyé, vacilla et tomba… puis se releva en portant sa main à son front. Le sous-officier ne se démonta pas et fit feu une seconde fois et une seconde balle frappa Albert au front qui tomba lourdement à la renverse… et se releva à nouveau.
Le sous-officier, interloqué, vérifia le canon de son arme mais celle-ci semblait fonctionner normalement.
– Tu m’a tiré dans la tête… deux fois ! Fit Albert qui bouillonnait de colère comme une cocotte minute.
– Euh… sans rancune !
Et la cocotte minute explosa.
« Grognon, grognon ! Pas content ! Violence ! Haine ! Bagarre ! Torgnolles dans ta margoulette ! » Cria Albert avant de se jeter sur le moindre Allemand qui passait à proximité et de leur faire tâter de la fureur légendaire du kangourou qui a du mal à digérer de se prendre deux balles dans la gueule.
Skarlett hypnotisa les renforts qui arrivaient et les força à se donner mutuellement des coups de crosse dans la tronche.
De son côté, Max pénétra dans un hangar et découvrit une autre merveille de la technologie allemande : un panzer A7V.
Max ne put résister. Il se mit aux commandes de l’engin et le mit en marche. Il fit ronronner le moteur puis le lança à sa pleine puissance… à 16 km/h.
« Ach so ! Mon Dieu, quelle puissance ! Je peux sentir le vent sur mon visage. »
Albert arrêta un instant de taper sur les Allemands pour regarder les évolutions et les dérapages contrôlés de l’énorme et impressionnante machine.
« My God ! This tank is Fast and furious ! »
Max dirigea les canons de l’A7V vers les bâtiments et ouvrit le feu. Il vida ainsi et sans discontinuer, sa réserve d’obus. Les bâtiments et les hangars n’étaient plus que des ruines fumantes et quelques foyers d’incendies finissaient de brûler ça et là.
Max coupa le moteur de l’A7V et sortit. Le reste de la garnison de la base s’approcha de lui en levant les mains en l’air.
« Ach so ! Nous nous rendons à toi… Panzer Max. »

Le bombardier Krok Kr.430, filait vers les lignes alliées. Hippolytus donnait ses consignes aux pilotes et ordonna aux ingénieurs de mettre en charge le générateur du CAMOR.
Un technicien se promenait tranquillement sur l’une des ailes du Stuka lorsqu’il aperçut un équipage aéroporté à leur poursuite. Il en informa aussitôt le capitaine Krok qui prit une paire de jumelles et regarda dans la direction indiqué par le technicien.
– Donnerwetter ! Il a retrouvé ses pouvoirs, comment est-ce possible ?… et il a encore sorti sa bite pour l’agiter dans tous les sens, il ne peut pas s’en empêcher.
– Ja, c’est inacceptable, mon capitaine. La convention de Genève devraient interdire un tel comportement.
– La ferme, espèce de fayot ! À vos postes de combat, le Kaporal Justice nous attaque.
Deux mitrailleuses ouvrirent le feu sur le Caporal, Horace et Mafé. Les balles sifflaient dangereusement autour d’eux mais le talentueux pilote qui menait ce glorieux équipage à travers les cieux eut l’idée de génie de détourner les balles de leur trajectoire en les faisant rebondir sur son énorme… hélice.
Certaines balles furent ainsi renvoyés vers les mitrailleurs qui mortellement blessés, s’exclamèrent :
« Ach so ! Le Kaporal Justice nous a tué avec sa bite ! »
Le Caporal prit de la vitesse et put enfin procéder à l’abordage du Stuka. Horace et Mafé se détachèrent et coururent sur la longue queue du bombardier tandis que le Caporal rangeait la sienne avant de rejoindre la bataille qui se jouait dans les cieux de la Somme.
Le cantinier s’attaqua au pilote et l’obligea à changer de cap. Le bombardier se détourna lentement de la ligne de front et commença à perdre de l’altitude.
Mafé prit pied sur les ailes d’où il délogea des soldats qui prenaient le Caporal pour cible mais rapidement des renforts arrivèrent. Ils étaient dix, vingt puis quarante et enfin soixante soldats sur les ailes du quadriplan… mais d’où pouvaient bien sortir tous ces Allemands ?
Une violente fusillade eut lieu. Les balles sifflaient entre les ailes et le moteur et depuis le poste de pilotage duquel Horace couvrait le pote Sénégalais.
Pendant ce temps, le Caporal balançait dans le vide les ingénieurs qui devaient faire fonctionner le CAMOR puis il mit la main sur Hippolytus Krok. Il lui colla une série de baffes à travers la tronche.
« Ça c’est pour avoir voulu me transformer en brocoli obèse, espèce de con ! »
Il entrava le scientifique puis rejoignit Horace.
– Occupes-toi de contrôler l’appareil et de le poser, je m’occupes de filer un coup de main à Mafé.
– Contrôler, contrôler ! Je voudrais t’y voir, c’est pas si simple de piloter cet énorme machin… Non ! Je sais ce que tu vas me dire mais tout au long de cet épisode, on a trop fait référence à ça, donc motus ! Dans le futur, on se fait censurer pour moins que ça sur Internet !
Le Caporal sauta par dessus le moteur et se retrouva sur les ailes du flan gauche. La distribution de baffes éjecta hors du bombardier une dizaine de soldats ennemis mais très vite l’appareil fut déséquilibré.
« Caporal ! Appela Horace. Il faut nettoyer le côté droit du premier plan des ailes avant de passer au second plan sinon je ne pourrais plus rien contrôler et on risquerait de s’écraser en plein milieu du no man’s land. »
Le Caporal nettoya donc les ailes du premier plan de gauche à droite puis il passa aux ailes du second plan et les nettoya de droite à gauche et ainsi de suite jusqu’au quatrième plan. Il était plus que temps car Mafé n’avait plus de cartouches et Horace s’apprêtait à réaliser un atterrissage forcé dans un bocage peu adapté à cela.
Le bombardier parcourut plusieurs dizaines de mètres en rasant le sol. Les trains d’atterrissage faillirent être emportés à plusieurs reprises et Horace évita de justesse que les ailes ne soient fracassés contre des arbres mais il réussit à poser le Stuka sans trop de dégâts.
Les trois compagnons descendirent du bombardier et quittèrent les lieux bien vite après avoir mis en pièces le CAMOR car ils se trouvaient toujours derrière les lignes ennemies. Ils emmenèrent Hippolytus Krok avec eux. Il fallait absolument priver l’armée allemande d’un tel concepteur d’armes ultra sophistiqués.

Quelques heures plus tard, le Caporal, Horace, Mafé, Panzer Max, Albert et Skarlett revinrent dans les lignes alliées avec une centaine de prisonniers de guerre dont le capitaine Krok. Ils furent acclamés dans différentes langues dont il fut assez difficile de reconnaître certaines d’entre elles.
Les prisonniers furent confiés à la Poste qui les envoya en recommandé avec avis de réception vers le Maroc.
Comme il fallait s’y attendre, Hippolytus Krok fut interrogé par les hommes du renseignement militaire mais refusa de parler.
La fine équipe du Caporal fit son rapport aux généraux Foch et Haig. La mission était un succès mais il y avait quelques ombres au tableau. Skarlett Meister s’était échappé d’un camp de prisonnières et surtout le Caporal avait recommencer à faire l’hélicoptère.
« Dites, les deux cons ! Fit Ferdinand à Max et Albert. J’ai deux mots à vous dire. »

Skarlett fut obligé de retourner en détention et promit d’être une « gentille fille sage » jusqu’à la fin de la guerre. Max et Albert intégrèrent l’équipe du Caporal Justice qui regagna le confort douillet du « Coco l’asticot ». Le zeppelin géant quitta la région de la Somme dont la sanglante bataille fut bien celle de toutes les peurs.

Quelque part derrière les lignes allemandes. Plusieurs camions s’étaient arrêtés en plein milieu de la campagne picarde, à l’endroit où un bombardier géant avait fait un atterrissage forcé.
Des soldats s’affairaient autour de l’appareil et notamment autour des débris du CAMOR. Un sous-officier après avoir constaté l’état du dispositif, s’approcha de l’un des véhicules et se mit au garde-à-vous.
– Mein herr ! Dit-il. Les Français ont mis cette machine en pièces, il sera difficile de la remettre en état de fonctionner.
– Ce n’est pas grave. Récupérez tout.
– À vos ordres, mein herr !
Le sous-officier alla transmettre les ordres de son supérieur tandis que ce dernier, sans sortir du véhicule, se débarrassa de l’emballage de sa friandise favorite : des saucisses de Francfort de la marque Globale Wurst.

 

FIN

Ne manquez pas le prochain épisode des incroyables et inimaginables aventures du Caporal Justice :

Offenses Yves sur les balcons

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